[Roadtrip au Cap Nord] Long is the road

[Roadtrip au Cap Nord] Long is the road

23/07/2018 0 Par Pierre-Emmanuel BOURGOUIN

Le kilomètre 0

Partons d’un postulat qu’il faudra garder à l’esprit tout au long de ce voyage et, d’une façon générale, de la rédaction de cet article (et des autres) : un plan est fait pour ne pas être suivi ! Sinon, c’est pas drôle… Enfin… Pas totalement quoi… (si tu veux d’ailleurs, tu peux jeter un oeil au parcours ici)

Alors j’avais prévu avec mon roadbook de te faire vivre une belle aventure en 10 épisodes, mais à y repenser à froid, je me suis dit que c’était déjà un peu prétentieux que de te garder avec moi pendant 10 épisodes, que d’autre part, ça allait quand même demander beaucoup de boulot de rédaction, et qu’enfin, il n’y avait peut être pas suffisamment de matière pour ce faire… Je vais donc me concentrer sur l’essentiel et histoire de te mâcher le travail, tu vas pouvoir aller directement à ce qui t’intéresse :

Un roadtrip au Cap Nord, c’est cool, mais d’une part faut y aller, et d’autre part, faut en revenir. Oui je sais… Facile… Mais je te l’ai déjà dit j’aime bien enfoncer des portes ouvertes. Bref, comme tu es un lecteur assidu (et super ordonné), tu as déjà lu le roadbook que j’avais fait dans les grandes lignes ici. L’objectif étant de rejoindre le Cap Nord le plus vite possible pour ensuite prendre mon temps. Et pour aller vite, faut aller droit ! Et pour aller droit, faut prendre l’autoroute !

De l’autoroute, de l’autoroute et de l’autoroute…

Première partie de cette remontée vers le grand nord donc, les autoroutes jusqu’à… Malmo ! Pas la peine de perdre du temps là dessus, c’est juste chiant à mourir tu t’en doutes. Seul point notable, la folle traversée de l’Allemagne qui, à l’aller comme au retour d’ailleurs, m’aura pris un peu plus de 3 heures. J’en parle ici si ça t’intéresse d’en savoir plus sur ce qu’il se passe sur une moto lancée à 250km/h sur autouroute en V max, ou 220km/h en V moy….

J’arrive donc à Puttgarden sans difficulté pour embarquer pour grosso modo 1 petite heure de traversée pour rejoindre le Danemark. 

Et là… Rebelotte ! De l’autoroute, Danoise ce coup-ci, jusqu’à Copenhague. 

Bon, à Copenhague, je ne pouvais pas ne pas faire un stop pour aller claquer la bise à la petite sirène, et faire un pèlerinage devant l’hôtel Cabin 🙂 A ce sujet, si tu cherches un hôtel vraiment pas cher bien placé, c’est un bon compromis ! Après, c’est plus du Ibis Budget que du Kempinsky, mais bon, ça fait l’affaire si tu veux juste un coin où dormir pour un weekend là bas.

Allez, je continue, direction la suède, et le fameux pont Øresundsbron qui traverse la mer et relie les deux pays. Au passage, je me suis dit que c’était une bonne idée que d’essayer de prendre des images aériennes sauf que je n’avais pas fini de sortir mon drone que des policiers s’arrêtaient pour me dire, gentiment, de passer mon chemin. J’avais en effet juste oublié qu’on était dans l’aire de l’aéroport de Copenhague, donc restrictions de vol… 

A la sortie du pont, un petit contrôle de papiers… Rien à redire, je montre ma carte d’identité, la carte grise de la moto, j’explique que je vais au Cap Nord, et c’est reparti !

Le camping de Klippan : service 5 étoiles

Il commence à être tard, mais je me dis que je vais continuer un peu à rouler, non sans me faire… comment dire… “défoncer” par ma moitié qui trouve que 1.250 km dans la journée c’est déjà pas mal ? Et je ne lui avais pas encore parlé de l’Iron Butt Challenge à cette époque… Je lui fais la promesse de m’arrêter dès que je trouve un camping… Direction Lund ! Mais évidemment, un camping sur l’autoroute, ça n’existe pas… Donc j’ai continué un peu, non sans faire une petite pause dans un Burger King au passage, mais je suis pas sûr que ce soit intéressant ça pour le coup. 

Au final, j’ai trouvé à Klippan ! Petit problème, j’arrive à 23h… Donc évidemment, tout est fermé… J’arrive à trouver un chemin pour rentrer en poussant la moto, histoire de ne pas réveiller tout le monde, puis un petit emplacement qui m’ira bien. Je plante la tente, file aux douches (oui c’était vraiment grand luxe à ce moment du voyage !), et dort comme une masse.

1.300 et quelques kilomètres plus tard…

Bilan de cette première journée ? 1.384 km avalés ! Damned ! A 2 doigts de faire mon premier Saddle Sore 1.600 k officieux 🙂 Globalement, ça s’est bien passé, et même si je suis crevé, je n’ai pas mal aux cervicales ni au dos. Le postérieur, c’est autre chose… Mais ça passera 🙂 Le seul point qui fut réellement “délicat” à gérer fut la chaleur ! Jusqu’à 36°C… Alors ok, ça ne parait pas énorme comme ça, mais il faut te mettre dans la peau du motard qui a un collant renforcé en kevlar avec des protections sous un jean, et un bon vieux cuir sur les épaules, sans parler du casque évidemment ! J’ai dû perdre à peu près 18 litres d’eau rien que sur cette première journée, et la suite sera la même…

La remontée de la baltique

Le lendemain, réveil à 6h… Et… Tout est encore fermé ! L’accueil n’ouvre pas avant 9h… J’envoie un mail en leur expliquant que j’ai passé la nuit sur site, que j’ai juste utilisé l’espace douche, et rien dans la cuisine, et en leur demandant s’ils préfèrent que je leurs fasse un virement, un PayPal, ou un chèque… Je recevrai un mail en réponse super sympa me disant simplement “revenez quand vous voulez, vous serez le bienvenu” ?

Entre temps j’ai déjà avancé pas mal sur cette route qui certes ressemble à une très grande autoroute, mais présente l’avantage d’offrir une vue typiquement suédoise… En fait c’est assez simple : des sapins, des bouleaux, des sapins, des bouleaux, des sapins et des sapins. 

Pas le temps de m’arrêter à Stockholm que je contourne. Je m’étais de toute façon promis de ne pas m’arrêter dans des villes dans lesquelles on peut aller passer un moment en amoureux ?… Déjà 550km dans les roues mine de rien. Idéalement, je voudrais me refaire la même chose qu’hier avec peu ou prou 1.300 km. 

L’ennui guette !

Cette route, l’E4, est terrifiante de monotonie… Il fait toujours une chaleur à mourrir, c’est d’ailleurs l’été durant lequel il y aura eu le plus d’incendies en Suède,  il n’y a aucun virage, c’est tout droit, tout droit, tout droit… Il n’y a pas vraiment de “perspective” puisque la route n’est pas non plus au bord de la mer, mais quelques kilomètres à l’intérieur des terres, alors ok, de temps en temps, on voit un peu de bleu, des lacs, des étangs, mais sinon, 99% du temps, c’est du bitume, droit, des sapins, verts, des voitures, lentes… C’est juste… Comment dire… Chiant ! Pas d’autre terme. 

Après le beau temps… Une pluie (mais quelle pluie !)

J’arrive à Härnösand et le temps change en un clin d’oeil pour virer à l’orage accompagné de pluies dignes de la mousson ! 

Je saisis le signal au vol : il est temps de s’arrêter ! Je verrai bien où j’en suis de mon programme sous la tente… Si je trouve un coin où poser la tente ! Sans que ce soit insurmontable, ça a quand même été une petite galère que de trouver un coin où se poser car, évidemment, je n’ai pas appliqué le premier conseil important du motard :

dès qu’il pleut, tu te protèges

Résultat, je dois idéalement me trouver un camping, et pas un coin de bivouac, pour pouvoir faire sécher mes fringues détrempées par l’averse, et là, le moins qu’on puisse dire, c’est que, autant les proprio du camping de la veille ont été géniaux, autant là, c’est compliqué ! 

Je découvre que par exemple, certains camping sont “réservés” aux campings cars... Il a fallu que je négocie pour pouvoir me poser dans un coin pourri derrière les baraques en jurant mes grands-dieux que je ne ferai pas de bruit et que je ne dérangerai pas avant qu’enfin, la charmante dame me laisse entrer ! 

2.373 km plus tard…

… je suis posé dans ma tente que j’ai monté en 2X2 (merci Décathlon), et même si la pluie tombe à grosses gouttes dehors, je dois reconnaître que je suis plutôt pas mal installé. 

Petit check point pour l’itinéraire : j’ai fait 988 km “seulement” aujourd’hui…

Pour être franc, c’est un peu la déception. J’ai perdu aujourd’hui toute l’avance que j’avais prise hier 🙁 Et le Cap Nord est encore à 1.300 km au bas mot…

Ceci étant, le temps de finir de m’installer, la pluie cesse, et le soleil revient pour m’offrir une magnifique fin de journée ! 

La dernière ligne droite avant le Cap Nord

Allez, après une bonne nuit au chaud, mes affaires sont sèches, et de toute façon, si ce n’était pas le cas, ce ne serait pas un soucis, il fait encore 30° minimum ! Je lève le camp bien décidé à rejoindre le Cap Nord ce soir ! 1.300 km dans la journée, je l’ai déjà fait, ça ne me fait pas peur de recommencer !

Première surprise de la journée : le brouillard…

Evidemment, avant de rejoindre le Cap Nord, je vais devoir reprendre ma route préférée ! J’ai nommé la route E4 !!! Franchement, j’en peux plus… Et plus je vais au Nord, plus elle se rétrécit, mais sans pour autant être plus amusante… 

Quand tu arrives au point haut de la Baltique, ça devient l’E10 en revanche ! Si tu continues à droite, tu restes sur l’E4… M’en fout de toute façon je vais au Nord. Bingo, la route est plus sympa, moins monotone, mais surtout, j’ai la “chance” d’avoir une météo surprenante, avec un immense soleil qui brille bien haut déjà mais qui ne fait qu’illuminer un brouillard comme j’en ai rarement vu ! Même les anglais doivent en être jaloux tellement il est épais ! Cela donne à la route une atmosphère absolument surréaliste, dont quelques images viendront longtemps alimenter le souvenir (cf dessous).

Deuxième surprise : on dirait les grands espaces du Canada…

Plus tu remontes, plus le paysage change, pour devenir très vallonné et t’offrir des panoramas de malade ! En même temps, plus tu remontes, moins il y a de monde… Je m’arrête pour déjeuner à Overkälix que j’ai justement aperçu de loin. Une petite bourgade tranquille installée sur un bout de terre à la jonction de je ne sais combien de cours d’eau qui lui donner presque un caractère insulaire. Quand je parle de cours d’eau, je ne parle pas de petites rivières, mais bien de larges fleuves dont objectivement ils seraient infranchissables sans les ponts qui sont là, et je me dis que ça va être pas mal quand il faudra préparer l’itinéraire pour la Russie… 

Troisième surprise : c’est lunaire

Je reprends ma route sans encombre, mais maintenant avec une petite appréhension : je suis seul au monde, j’ai dû croiser deux voitures depuis que j’ai pris l’E10, et j’ai déjà manqué une fois la panne sèche de peu ! Les stations service se raréfient autant que les villes et villages, et laissent la place à une végétation qui change également. 

Ce sont maintenant des grands espaces boisés de petits arbustes, beaucoup d’herbes folles, et… un paysage lunaire !

Après les forêts, je traverse maintenant un coin fait de grandes étendues de… sable et de rochers ! Très peu de végétation, personne sur la route, et ce pendant près de 300 km ! Deuxième frayeur de la journée, j’arrive à une station service à laquelle je retrouve un Hollandais que je croiserai plus tard à nouveau alors que l’ordi de la moto n’indique même plus combien de km il me reste avant de tomber en rade… Je mets quand même 19,5 litres d’essence dans un réservoir annoncé pour 19 litres. J’étais vraiment pas loin de la panne sèche.

Quatrième surprise : c’est glacial !

Je m’engage dans des gorges rocailleuses alors que la route devient maintenant super marrante, très tournante, et surtout très roulante ! Le revêtement est top et accroche bien, et le paysage est magique. Les parois sont taillées à la serpe, je distingue un torrent en contrebas, et toujours personne sur la route. Il faisait encore une trentaine de degrés avant de m’engager là dedans, et je sens que l’air se rafraîchit, ce qui n’est pas pour me déplaire.

Ceci étant, ce serait pas mal que ça ne rafraichisse pas trop non plus parce que passer de 30° à 20° en l’espace de 5 mn, ça fait bizarre…

Mais non, la dégringolade continue ! Quand je sors des gorges, il ne fait plus que 7° ! 

J’arrive à Alta… Il reste 230 km avant le Cap Nord… Allez, j’y crois, je vais tenir ! Je m’engage dans la dernière portion de route qui permet de remonter vers mon objectif… Et la température baisse encore 🙁 Il ne fait maintenant plus que 4°C ! 

Et c’est à cet instant qu’un éclair de lucidité est venu me traverser l’esprit… A quoi bon continuer à se meuler comme ça si c’est pour chopper la crève pendant le reste de mon roadtrip ? Je suis congelé, il n’y a plus de soleil, mais des nuages, rien pour me réchauffer, je décide de m’arrêter à Skaïdi…

Pourquoi Skaïdi ? 

Parce que j’ai été faibllllleeeeee…. J’ai pris mon téléphone, lancé l’application booking.com, et cherché un hôtel le plus près possible !

Cinquième surprise : un sauna… dans ma chambre !

Je n’ai pas cherché un hôtel de standing, pas plus qu’un hôtel original… Non, j’ai juste cherché un hôtel, et je suis tombé sur le Skaidi Hotel, qui d’habitude est plus trusté par les habitués de la chasse aux aurores boréales que par les motards… Encore que ça se discute…

Quel bonheur de savoir que j’ai une chambre qui m’attend ! Alors ok, c’est une chambre “standard”, mais elle a deux lits jumeaux, une petite salle de bain et… un sauna ! Oui oui ! Un sauna dans la chambre ! Et a priori, c’est juste “normal”… Ça tombe bien, moi qui voulais me réchauffer, je vais être servi 🙂

A 150 kilomètres du but

J’aurais fait 1.180 km de plus aujourd’hui… J’y étais presque, mais de temps en temps, c’est pas mal d’être raisonnable non ?

En tout cas, cela porte le total à 3.553 km en 3 jours ! Pas mécontent malgré tout d’avoir abattu tout ce boulot en si peu de temps, même s’il faut bien le reconnaître, c’est loin d’être la meilleure partie du voyage !

J’ai quand même une moto qui ne se prête pas du tout à ce genre de périple, quand bien même je l’adore et qu’elle est géniale à plein d’égards, mais en gros, c’est un peu comme si vous décidiez de partir courir un trek en montagne équipé de claquettes… 

Bref, l’objectif, maintenant, c’est de se réchauffer, et de se reposer… 

Le parcours

Le résumé du parcours jusqu’à présent : 


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